De mon avis sur la politique de transport en commun francilienne.

On me suggère de donner un avis sur la RATP. Je vais me permettre d’élargir un peu la focale car à mon avis la RATP est juste le dernier maillon de la chaîne. Rappelons tout d’abord quelques éléments car les transports n’existent que parce que les hommes vont et viennent de points à d’autres pour des raisons principalement économiques.

La distance domicile travail a doublé en 20 ans. Les prix de l’immobilier qui connaissent généralement des cycles de dix ans de hausse pour cinq ans de baisse entament cette phase de descente. Des populations de retraités risquent de quitter dans les années à venir les centres-ville pour rechercher leur « sun-belt ». Le niveau du pétrole dans les années à venir risque de rendre extrêmement onéreux des déplacements quotidiens en voiture. Paris est une capitale qui restera attractive dans les années à venir, du fait du réseau national de transport, de la présence des directions de l’état, des entreprises et puis parce que c’est une belle ville malgré tout.

Bon que cela veut il dire en pratique ?

1) Le déclin de l’opportunité et de l’attractivité des zones périurbaines est devant nous.

Le développement incontrôlé de maisons individuelles ou l’implantation d’urbains en proche zone rurale dans une bande de 30 à 100 km de Paris a été une catastrophe.  Catastrophe civilisationelle qui passe des gens à vivre un temps incroyable dans leur voiture ou dans des trains de banlieue et à ne cotoyer l’autre que dans des centre commerciaux , catastophe écologique (impact CO2 des transports et d’un habitat énergivore), catatrophe économique et sociale à venir. Car le prix de l’essence va rendre extrêmement couteux un tel mode de vie, choisi en général par ceux qui fuyaient le prix trop élévé de l’immobilier du centre de l’agglomération. Et rendre très difficile leur situation s’il souhaitent revenir sur ce mode de vie : la baisse de l’attractivité de zones aussi éloignées des centre ajoutée au début du déclin des prix immobilier obligerait à des ventes à pertes extrêmement lourdes pour quiconque voudrait vendre la petite maison achetée sur 30 ans.

2) Les paradoxes de la ville-centre

Des populations de retraités vont souhaiter changer de qualité de vie et quitter Paris. Les prix sont trop hauts aujourd’hui pour que le marché absorbe le stock de logement à venir. Tension vers la baisse. Mais de nouvelles familles, hausse de la population, intérêt pour des temps de transports réduits et plus économes. Tension à la hausse. Au final, il est probable que Paris puisse  encore absorber une population nouvelle, de l’ordre de quelque dizaines de miliers d’habitants, aidée en cela par les 10% du territoire de la ville actuellement en réaménagement et qui amèneront un stock supplémentaire de logement, le tout dans un contexte local de baisse modérée des prix.

3) Le vrai défi ? Encore la banlieue !

On voit donc où va se situer le territoire attractif : dans une bande de 30 km autour de Paris. Sur les territoires déjà décris comme difficiles, mal desservis, etc. Et le problème est que ces territoires risquent de subir une nouvelle pression sur le logement, qui va nous amener à ce qui nous intéresse : une pression aggravée sur le réseau de transport en commun. Je m’avance un peu et je pronostique que, si rien n’est fait, une hausse du trafic de plus de 40% est elle à prévoir dans les 15 prochaines années. Notre réseau est incapable de faire face à une telle situation.

Quelles stratégies possibles ?

Plusieurs choses.

D’abord, jouer sur l’organisation de l’espace. Les espaces les moins denses sont les plus difficiles à organiser au niveau des transports en commun et les plus énergivores. Il fait donc organiser autour de Paris des « pôles de densité », attractifs au niveau urbain avec logements, commerces, emplois et service. Ces nouvelles zones-centre doivent bénéficier d’un réseau de transport aussi dense que celui de Paris-centre et être reliés les uns aux autres par des dessertes efficaces. La stratégie des villes nouvelles n’était pas foncièrement mauvaise : on voit d’ailleurs qu’elles agrègent beaucoup de flux quotidiens et qu’elles soulagent en partie le centre de la périphérie. C’est son exécution qui s’est conjuguée avec de mauvaises réponses en termes d’aménagement social et urbain (ghettos sociaux, urbanisme contestable, etc). La localisation de bureaux et d’emplois dans ces zones est déterminant.

Ensuite, économiser des déplacements. On revient souvent sur les débats relatifs au temps de travail en ommettant de prendre en compte le temps du transport subi, qui va croissant, dans la réflexion. Alors que la présence physique dans beaucoup de bureaux n’est pas indispensable (ou au moins pas  nécessaire toute la semaine). Et que l’évolution vers le télé-travail  est ineluctable parce que les entreprises auront à y gagner : retards, exigences salariales relatives au coût du transport, stress et productivité des salariés, coût du mètre carré de bureau. Il est probable qu’elle ne perçoivent cet intérêt que tard, partiellement et en ne l’organisant pas dans les conditions favorables au salarié. D’où l’importance que le politique organise cela en veillant à quelques éléments clefs : égalité hommes/femmes dans la présence à domicile, soutien financier de l’entreprise aux m2 du salarié qui seront consacrés au travail, attention portée à la possibilité de « débrancher » hors du temps de travail hebdomadaire, etc. Et qu’il rende attractif cette solution en la pratiquant lui-même.

Si cette solution est développé massivement à l’avenir ce sont enfin des centaines de milliers de m2 qui pourraient être réaffectés au logement au centre de l’agglomération. Et donc faire baisser la presssion sur le réseau de transport.

Mais nous n’échapperons pas à un effort historique à mener sur le réseau. Un effort à la mesure de celui de la construction du réseau il y a un siècle ou celui de son développement régional dans les années 50-60-70.  Parce qu’il va falloir absorber un transfert auto/transports important. Il va donc falloir créer de nouvelles lignes de RER et de métro, en liaison Banlieue/Banlieue et en liaison Banlieue/Paris. Ce n’est pas tout : cette évolution va peut être décongestionner un peu certains axes autoroutiers qui pourraient aussi avoir leurs voies de bus pour un réseau de transports routiers propres et en sites protégés pour assurer un temps de parcours rapide. Enfin, les solutions du type parking-relais, auto et vélo-partage doivent se développer, mais aussi hors de Paris, à l’échelle de l’agglomération.

Puisque il s’agissait aussi de parler du mode de transport en temps que tel, je ferai une suggestion. Les système d’affichage du temps d’attente des métros c’est super. Mais ce serait beaucoup mieux, lorsque l’on a des stratégies de correspondances multiples possibles, que ces temps ne soient pas affichés que sur le quai, mais à l’extérieur de la station, dans les arrêts de bus proches, sur les autres quais. Vous avez compris l’idée non ? Qui ne s’est pas retrouvé sur un quai face à une attente longue rapporté à l’autre choix de trajet qui aurait été possible ?

J’omet bien des choses et le lecteur m’en pardonnera. J’aurai loisir à l’avenir de revenir sur le débat lié à l’organisation politique de l’agglomération. En attendant, je refile la chaîne à Laurianne Deniaud, aux rédacteurs du Bondy-blog, à Laurent Gloaguen, à Tristan Mendès France et à Maître éolas.




2 pensées sur «De mon avis sur la politique de transport en commun francilienne.»

  1. assez bonne analyse de la situation des métropole aujourd’hui.
    Pendant des années, les français ont rêvé du pavillon avec un jardin, ct le rêve, le signe de la réussite pour la classe moyenne et au dessus. Pour les classes les plus pauvres, partir en banlieue était le seul moyen d’être propriétaire. N’oublions pas que pendant des années, la rénovation des centres villes, la boboification des villes centres à fait exploser le prix du m².
    Alors aujourd’hui comment faire. Avoir une politique foncière publique, préemptons les terrains, ayons une vision à long terme pour permettre d’avoir une mixité sociale dans nos centres urbains. Martine Aubry par exemple la fait sur Lille, Gérard Collomb fait des baux emphytéotiques pour les HLM, autre moyen pour garder une mixité dans la ville.
    Après, il faut organiser les transports en conséquence. la mise en place de site propre, la création de lignes de tram, de métro est indispensable pour permettre cette révolution urbaine.

  2. Celui qui te propose de donner ton avis sur la politique de transport en commun a eu une très bonne idée puisque c’est toi qui donne l’analyse la plus poussée.
    Par ailleurs, il faut savoir que François Fillon refuse encore et toujours de prendre part au financement du SDRIF revenant sur la parole de l’Etat français. Voilà encore une façon d’exaspérer les Franciliens…

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